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La caméra avait été placée au-dessus de l'épaule de l'Acteur X. Depuis une vitre brisée se trouvant à quelques distances de là, j'observais les zombies qui titubaient à l'extérieur. Si la scène avait été réelle, je n'aurais pas pu l'imaginer visuellement différente. Le tournage de la séquence commença. Les flammes jaillirent du véhicule alors que les zombies se mettaient péniblement en marche. L'Acteur X, à ma gauche, apportait une touche de sérieux à la scène. Je regardais ma montre qui indiqua que nous nous approchions de minuit. Je jetais une nouvelle pilule vitaminée au fond de ma gorge desséchée. Il me fallait tenir jusqu'au bout. Plusieurs autres scènes de l'Acteur X manipulant des munitions et son arme furent tournées, ainsi qu'une interview qu'il réalisa pour le "making of" qui sortirait en vidéo. Je réussis à l'approcher et lui posais quelques questions dont les réponses seraient nécessaires à l'écriture de mes articles, quand je serais de retour au Japon. Il fut continuellement aimable et j'eu l'impression que, ce qui avait commencé comme une corvée était devenu finalement une partie de plaisir. En fait, c'était le sentiment général qui semblait flotter sur le plateau. Ce tournage n'avait rien de normal. C'était en train de devenir le petit film de zombies de Romero, un tournage dont on pourrait encore parler des années plus tard. L'Acteur X étant un mineur, il ne pouvait travailler que 9 heures, dont une heure était réservée au repas. Il fut donc libéré après cette dernière scène. Dommage pour lui - ce fut le moment choisi pour faire la séquence la plus onéreuse du film. La caméra fut déplacée devant l'entrée du commissariat et placée sur une plate-forme qui culminait à dix mètres de haut. En dessous se trouvait la voiture de police "inflammable" ainsi qu'un autre véhicule. Les zombies principaux - ceux qui avaient les maquillages les plus effrayants- étaient de la partie. Une machine à brouillard et une machine à vent avait été placées à l'arrière de la scène. Un machiniste se trouvait près de la machine à vent avec un tas de vieux journaux, de feuilles et d'autres débris et se tenait près à tout envoyer lors du passage des zombies. Juste à droite de l'entrée de la prison, Romero et son équipe avaient établis leur campement au pied de la caméra. Des chaises pliantes et une table avaient été placées autour de Romero et de son écran de contrôle. Les répétitions commencèrent. Les zombies, qui s'étaient allongés sur le sol pour récupérer un peu, se rendirent à leur place. Le pot pyrotechnique fut rallumé dans la voiture. La machine à vent commença à souffler. L'éclairage figurant un hélicoptère se positionna à son emplacement prévu. Romero s'écria "Action". Les zombies se mirent ne marche en grognant, leurs cris couvrant même le son des différents appareils en action. Je courrais dans tous les sens afin de prendre le maximum de photos. Des photos de Romero, de zombies, de membres de l'équipe de Mad George qui se tenaient maintenant à l'écart et observaient leurs créations en mouvement. La scène fut rapidement prête à être filmée. Cette fois-ci, la machine à brouillard fut préalablement mise en route, et une légère brume recouvrit le plateau. Les flammes émergeant du véhicule de police émettaient une lumière aveuglante. La prise fut faite. Mais Romero n'en fut pas satisfait. Tout fut remis en place et refilmé. Le problème du temps devint une nouvelle donnée à prendre en compte. Cette scène était excitante et s'il s'était agi d'un film, elle aurait pu être savourée sous différents angles de vue. Mais il s'agissait d'une publicité. Le temps était un facteur décisif pour tout. Brusquement, Jason s'approcha de moi. Aussi bizarre que cela me parut, personne dans l'équipe n'avait de chronomètre sur sa montre et je devais lui prêter la mienne qui en était équipée. Je lui passais rapidement ma Casio anti-shock et lui expliquait son fonctionnement. Jason courut vers George et lui montra la montre. Romero hocha la tête en signe d'approbation. Nom d'un chien, pensais-je. Il s'agissait vraiment d'un tournage de Romero, où tout le monde participait de toutes les façons possibles! Cherchant un nouvel emplacement pour prendre mes photos, j'en trouvais un juste à côté d'une benne à ordure, située à côté de la voiture enflammée, mais j'en fus éjecté par un type avec un extincteur. Ce ne fut pas une mauvaise chose car quelques secondes plus tard car le pare-brise de la voiture de flic explosa sous l'effet de la chaleur. La scène fut rejouée une nouvelle fois. Romero donna quelques conseils de dernière minute aux zombies. Il avait dit plus tôt qu'il ne préférait pas donner d'ordres aux zombies, car ceux-ci avaient la fâcheuse tendance à mettre en pratique uniquement ce qu'il disait. Et, ajouta-t'il, aussi saugrenue que cela puisse paraître, les gens ont généralement une bonne idée de la façon dont un cadavre peut se déplacer. Il essayait actuellement de calmer des zombies un peu trop exubérants afin qu'ils ralentissent leurs mouvements et que la vitesse vienne des mouvements de la caméra. Il termina ses recommandations par les mots suivants: "Ils sont morts, ils sont complètement bousillés". Je laissai échapper un éclat de rire. Les yeux de Romero se fixèrent sur les miens. "J'ai déjà entendu ça quelque part", ajoutais-je. Nous nous sourîmes mutuellement comme des enfants trop vite grandis. Je décidais à cet instant précis que George était complètement cool. Le tournage se poursuivit et j'utilisais d'autres rouleaux de pellicule. Après le huitième rouleau, je me dis que je m'inquiétais trop au sujet des photos et que je ne profitais pas assez du spectacle. Je reposais donc mon Nikon. Je m'assis dans une chaise de directeur, à dossier souple, qui était située au premier plan, juste en deçà de l'angle de caméra. Devant moi se tenaient des zombies qui attendaient d'entrer en scène et derrière moi étaient assis Romero, Jason et son équipe. Le tournage allait recommencer. Je me détachais de la réalité et me concentrais: |
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De gauche à droite et de haut en bas: Les figurants se reposent, puis prennent leurs places et finalement, la caméra se met à tourner! |
Le vent poussa la brume, faisant tourbilloner les papiers. Plusieurs morts-vivants, utilisant le sixième sens des zombies concernant la chair humaine, trébuchaient devant une voiture de police enflammée. Venant du ciel, le projecteur d'un hélicoptère découpait un cône de lumière virevoltant dans le brouillard. Les zombies, n'y prêtant pas garde et concentrès sur leur objectif, grimpaient une à une les marches d'un commissariat abandonné. Prêt de la voiture de police se trouvait le corps torturé de ce qui avait été son conducteur. Il essayait présentement de se relever. Son visage paraissait affamé. Un autre zombie, dont les lèvres avaient disparues, leva ses bras en l'air en pénétrant dans le commissariat par sa porte ouverte. C'était ce qui fut joué devant moi. Rien ne me parut téléphoné ou mal joué. Il s'agissait de zombies en panoramique, avec une haute qualité d'image. Un frisson me parcouru la colonne vertébrale. Aussi froid qu'une goute d'eau provenant d'une canalisation au fond d'un vieux sous-sol. Il s'agissait d'horreur pure - et j'en adorais chaque seconde. Finallement, Romero fut satisfait du résultat et la scène fut mise en boîte. La longue journée était finie. Il était 5h00 du matin. J'avais dépassé depuis longtemps les 24 heures sans sommeil. Je saluais Romero et Jason et fis le tour des caravannes. Les zombies faisaient une ligne et attendait impatiement qu'on leur enlève leur maquillage, afin qu'ils puissent rentrer chez eux. Un van s'arrêta devant moi et Yaji me fit signe de la main. C'était mon transport pour rentrer à l'hotêl. Nous roulâmes à travers le centre ville de LA, dans le soleil levant. Je tentais d'aller directement au lit mais le flot de souvenirs de la journée écoulée était trop fort. Je ne pu m'endormir qu'à 6h30, quand toutes ces images se fondirent en un kaléidoscope incompréhensible. |
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Les zombies attaquent le commissariat, sous les yeux de la caméra et de Romero |
Le texte est © Wesker pour SurvivHor © 2001, tous droits réservés |